6 juin 1582
STRACK Léonard
SARTORIS Jacques
27 février 1636
JACOBI Pierre
18 septembre 1652
JACQUEMIN Etienne
26 mai 1667
JACQUES Jean
MERCATOR Georges
6 juin 1672
PIERRE Charles
PARENT Henri
du 19 février 1688 au 8 octobre 1726
GOUVIENNE Jean Mathias
du 18 décembre 1726 au 10 août 1775
Né le 4 avril 1743 - Ordonné le 24 septembre 1768
Décédé en février 1814, à 71 ans
Vicaire de Farschviller du 19 avril 1771 au 18 septembre 1771
Né le ??? - Ordonné le 21 septembre 1771
Vicaire de Farschviller de 1771 à 1772
Décédé le ???
Né le 20 septembre 1742 - Ordonné le 23 septembre 1769
Vicaire de l’abbé GOUVIENNE du 6 juillet 1773 au 16 janvier 1775
Décédé le 12 juin 1814, à 72 ans
Curé de Farschviller du 10 août 1775 à 1777
Décédé à Farschviller le 3 janvier 1780, à l’âge de 69 ans
Né en 1759 - Ordonné le 20 septembre 1777
Vicaire de Farschviller de 20 novembre 1777 au 23 décembre 1778
Né le 5 avril 1759 - Ordonné le 24 septembre 1785
Vicaire de l’abbé BLATTNER
du 23 janvier 1787 au 11 septembre 1792 → de27 à 33 ans
Il quitte la paroisse en septembre 1792 et se retira au comté de Leyen
Né le 5 avril 1759
Ordonné le 24 septembre 1785
Décédé le 19 mars 1830 à 71 ans
COLT Nicolas Hilarion
Ordonné le 24 septembre 1768
Curé de Farschviller du 05 juin 1803 au 1er octobre 1810
Décédé le ?????????
Curé de Farschviller du 1er avril 1814 au 1er février 1821
Né le 20 mai 1792
Ordonné le 21 septembre 1816
Curé de Farschviller du 1er février 1821 au 10 octobre 1841 → de 29 à 49 ans
Décédé à Roupeldange le 28 décembre 1869 à 77 ans
Ordonné le 19 septembre 1829
Curé de Farschviller du 11 octobre 1841 au 10 juillet 1853 → de 36 à 48 ans
Décédé à Farschviller le 10 juillet 1853 à 48 ans
Né le 12 février 1802
Ordonné le 2 septembre 1826
Curé de Farschviller du 9 août 1853 au 1er novembre 1856 → de 51 à 54 ans
Décédé le ???
Né le 5 septembre 1812
Ordonné le 3 septembre 1838
Curé de Farschviller du 1er novembre 1856 au 5 septembre 1862
Décédé le ??? → de 44 à 50 ans
Né le 26 juin 1807
Ordonné le 19 mars 1831
Curé de Farschviller du 1er octobre 1862 au 20 octobre 1889 → de 55 à 82 ans
Décédé à Farschviller le 8 janvier 1891 à 84 ans
Né le 10 mai 1857
Vicaire à de l’abbé MULLER du 25 octobre 1883 au 8 janvier 1891
→ de 26 à 34 ans
Né le 10 mai 1857
Ordonné le 15 juillet 1883
Curé de Farschviller du 12 janvier 1891 au 21 janvier 1928 → de 34 à 71 ans
Décédé à Farschviller le 21 janvier 1928 à 71 ans
Né le 11 octobre 1883
Ordonné le 18 juillet 1909
Curé de Farschviller du 11 février 1928 au 20 décembre 1960 → de 45 à 77 ans
Décédé à Farschviller le 20 décembre 1960 à 77 ans
Né le 9 février 1921
Ordonné le 14 juillet 1946
Curé de Farschviller du 1er mai 1961 au 1er juillet 1966 → de 40 à 45 ans
Décédé le 9 juillet 1990 à 69 ans
Né le 12 décembre 1906
Ordonné le 19 juillet 1931
Curé de Farschviller du 1er juillet 1966 au 1er septembre 1968 → de 60 à 68 ans
Décédé le 22 août 1984 à 78 ans
Né le 23 mars 1921
Ordonné le 4 juillet 1948
Curé de Farschviller du 1er septembre 1968 à septembre 2001 → de 47 à 80 ans
Décédé le 22 juin 2007 à 86 ans
Né le 1er juillet 1958 à Kpete-Maflo (Togo)
Ordonné le 08 août 1987
Curé de Farschviller de septembre 2001 à septembre 2006
Né le 25 février 1970 à Laxou (54)
Ordonné le 29 juin 1997
CHAUDEY David
Né le 19 août 1976 à Boulay
Ordonné le 29 juin 2003
Né le 17 février 1945 à Spicheren
Ordonné le 29 juin 1974
Curé de Farschviller du 01 septembre 2011 au 1er septembre 2020.
LES PRETRES SOUS LA REVOLUTION
Durant les années noires de la Révolution, le culte n’était officiellement plus assuré. La plupart des prêtres avaient refusé de prêter serment à la République et avaient quitté leur poste pour se cacher, ou même fuir le pays. La plupart des prêtres de notre région se rendirent au pays de Leyen, c'est-à-dire de l’autre coté de la Sarre entre Sarrebruck et Sarreguemines. Le régime révolutionnaire avait installé à leur place d’autres religieux qui avaient prêté serment d’allégeance au nouveau régime. Si le pays semblait débarrassé des religieux voulant rester fidèles à l’église romaine, certains continuaient clandestinement, et bien souvent au risque de leur vie, à administrer les sacrements.
Georges TOUBA, instituteur à Rémering, nous livre les noms des prêtres parcourant notre région : Stéphane ROYSER, Pierre BLATTER, Jean BLATTER, Kasper STOCK, Joseph LUCCAS et Jean-Nicolas STEIN.
Farschviller, Ellviller, Loupershouse, Guebenhouse, Puttelange, Diefenbach, Morsbronn, Ballering, Saint Jean Rohrbach, Hilsprich et Heckenransbach faisaient partie de leur zone d’action. Mais les registres paroissiaux ne nous livrent aucun renseignement sur le nombre de baptêmes ou de mariages célébrés, car ces sacrements étaient célébrés dans le plus grand secret et non registrés.
A partir de 1791, un certain nombre de religieux, contaminés par la propagande républicaine, se sont appropriés, peu à peu, des postes et des paroisses, chassant ainsi les occupants précédents.
Ainsi en juillet 1792, l’abbé BLATTNER, curé de Farschviller, quitte la paroisse. Son vicaire, Georges GREFF, en assurera la permanence jusqu’à son départ, au cours du mois de septembre suivant, laissant le poste inoccupé jusqu’en 1802.
Durant ce temps, à Hoste et Puttelange, officiaient un capucin, Wenzel RUMPLER et son vicaire, SCHMELTZ. Tous deux, ayant prêté serment à la Constitution, n’avaient pas la sympathie des paroissiens. La plupart des gens de Loupershouse préféraient se rendre à Farschviller chez l’abbé GREFF, pour y faire baptiser leurs enfants. En septembre 1792, avec le départ de Georges GREFF, les paroissiens, n’ayant plus la possibilité de recourir à un prêtre légitime, se retrouvèrent contraints d’avoir recours aux prêtres assermentés.
En 1793, il n’y eut que 7 baptêmes à Loupershouse et un seul à Farschviller, car rapidement s’était propagée la nouvelle qu’un prêtre missionnaire, fidèle à Rome, sillonnait la région et administrait clandestinement les sacrements. L’un des premiers prêtres réfractaires fut le père KONRAD, un capucin de Sarreguemines. Il baptisa 2 enfants à Farschviller en 1793, et 3 l’année suivante.
En 1795, le père STEIN baptisa 9 enfants tandis que le prêtre assermenté de Hoste n’en baptisa qu’un seul. En 1796, seuls 2 enfants reçurent le baptême : l’un, par le père STEIN et le second, par le père Joseph LUCAS, lui aussi prêtre clandestin.
Fin juin 1797, l’abbé Georges GREFF est de retour et relève le père STEIN. Il propose également ses services à l’abbé François VERSCHNEIDER de Puttelange. Avec le retour d’un prêtre officiel et en raison d’une accalmie dans la tourmente révolutionnaire, le nombre de baptêmes augmente à nouveau : 8 en 1797 ainsi qu’en 1798, 19 en 1799, 22 en 1800, 19 en 1801 et en 1802.
Quant à l’abbé BLATTNER, il revient, en 1802, de son exil passé dans le comté de Leyen. Mais, dès le 4 juillet de la même année, par une lettre à son évêque de Metz, il demande sa mise à la retraite pour raison de santé et celle-ci lui est accordée.
Peu de temps après, Georges GREFF demanda à l’évêque de lui retirer la charge de Puttelange pour ne lui laisser que celle de Farschviller. Il y resta jusqu’en mars 1803 avant d’être nommé à Welferding où il mourut le 19 mars 1830, à l’âge de 71 ans.
L’ABBE GEORGES GREFF
C’est souvent dans les moments difficiles que l’on reconnaît la valeur d’un homme. Ce fut le cas pour l’abbé Georges GREFF qui desservit notre paroisse pendant les années sombres de la Révolution Française.
Georges GREFF est né le 5 avril 1759 à Forbach. Fils de Pierre GREFF et de Barbe JUNG, il est ordonné prêtre, le 24 septembre 1785, à la cathédrale de METZ. Il est envoyé le lendemain même, comme vicaire à Deux-Ponts, (ville allemande, à ce jour).
L’année suivante, le 20 novembre 1786, alors âgé de 27 ans, il prend ses fonctions à Farschviller comme nouveau vicaire de l’abbé BLATTNER.
Chaque semaine, par tous les temps, il se rendra le dimanche, à Ellviller pour y célébrer la messe et les sacrements. C’est alors que soudain éclate la Révolution.
Les représentants de la toute nouvelle République exigent alors que les ministres du culte prêtent serment d’allégeance à la nouvelle Constitution.
Comme beaucoup, Georges GREFF s’y refuse. Il peut cependant encore conserver ses fonctions jusqu’à la loi de déportation du 26 août 1792.
Comme tous les prêtres réfractaires de notre région, il prit la route du comté de Leyen pour échapper aux représailles des révolutionnaires et de ceux qui voulaient se débarrasser, une fois pour toute, de l’Eglise et de ses ministres.
Mais dès 1797, il est de retour au village. Il administrera, cette même année 1797, 8 baptêmes, puis 8 l’année suivante, 19 en 1799, 22 en 1800, 19 en 1801 ainsi qu’en 1802.
Après le retour de l’abbé BLATTNER, en 1802, Georges GREFF s’établit avec lui à Puttelange.
Il fit malgré tout sa déclaration le 26 mai 1802 et fut amnistié le 8 janvier 1803.
Sous la pression des habitants de Farschviller, le conseil municipal adressa une émouvante lettre à Monseigneur Pierre François BIENAIME, évêque de METZ, en faveur de Georges GREFF, unanimement reconnu, estimé et aimé.
A Monseigneur BIENAIME, évêque de METZ.
Ont l’honneur d’exposer vos fidèles sujets, les maire, adjoint et membres composant le conseil général de la commune de Farschviller, quatrième arrondissement de Sarreguemines, département de la Moselle et aux noms de nos administrés, vos soumis sujets.
Que, depuis l’époque 1786 jusqu’à la déportation, le citoyen Georges GREFF a été notre vicaire.
Revenu sur nos demandes réitérées de 1796, il a quitté notre paroisse et celle de Puttelange dont il a été chargé ; il a été désolé de donner plutôt sa vie pour nous que de nous abandonner il a non seulement exposé sa vie plus de cent fois, dont j’étais souvent un fidèle témoin. Mais il a encore sacrifié sa santé ne jouissant d’aucune cure que celle de la nuit des bois et de la retraite la plus réservée jusqu’au moment que la persécution a un peu cessé.
Il nous a soulagé et consolé durant toute cette malheureuse époque sans aucun intérêt temporel.
Nous apprenons malheureusement aujourd’hui avec consternation et vives douleurs que notre cher pasteur, notre unique consolation, doit nous être enlevé.
Ah, Monseigneur, nous vous supplions humblement de nous donner cette consolation, de permettre qu’il achève maintenant après tant de fatigue et périls le reste de ses jours, au milieu de nous, qu’il partage avec nous le fruit de ses travaux et le comble des bienfaits de notre salut, de l’union et de la tranquillité qu’il a rétablies et maintenues dans nos chaumières, et qu’il nous conduise dans les voix du salut jusqu’au tombeau
C’est cette grâce Monseigneur que nous vous demandons, c’est de conserver pour jamais et pour la vie notre cher pasteur Georges GREFF qui a fait jusqu’aujourd’hui notre unique consolation et qui ne cessera de la faire dans notre postérité……….
C’est dans cette unique espérance que nous vous présentons notre chétive demande en priant Dieu pour la conservation de vos jours, vos très humbles et très obéissants et soumis sujets.
Fait à Farschviller, le dix sept germinal an onze de la République, et le sept avril 1803 et avons signés……….
Georges MAYER, maire
Pierre DONATE, adjoint
Mathis DELESSE
Nicolas CALMES
Ce n’est que fort rarement que les habitants de Farschviller ont exprimé autant d’éloges pour l’un de leurs prêtres.
L’AFFAIRE SIEBERING
Le 1er février 1821, Georges SIEBERING est installé comme nouveau curé de la paroisse. Il succède à Jean Jacques VALERIUS, unanimement apprécié et aimé de tous.
A cette époque, désormais révolue, Farschviller comptait environ 535 habitants. La commune était prospère et la paroisse ne se distinguait en rien des autres paroisses.
Comme dans tous les villages en ce temps-là, le maire, le curé et l’instituteur étaient les trois personnalités de la communauté. Le maire dirigeait les affaires de la commune, le curé celles de la paroisse et l’instituteur instruisait et éduquait la jeunesse.
La plupart du temps, les trois agissaient de concert et les choses se passaient alors dans le calme, l’ordre et la discipline.
Toutefois, dès l’arrivée de Georges SIEBERING, les Farschvillérois se rendirent vite compte du caractère bien trempé de leur nouveau curé : celui-ci avait des idées bien précises, non seulement sur les affaires de sa paroisse, mais aussi sur celles de la commune.
Mais il ignorait encore l’obstination dont pouvaient faire preuve les habitants de Farschviller. En effet, dix-huit mois seulement après son arrivée, le 29 août 1822, le maire, Louis WILMOUTH, et son conseil envoyèrent une première plainte à M. VALLBOCK, secrétaire de l’évêché de Metz.
Tous se
plaignent, écrivait-il,
‘‘de la situation affreuse causée par les tracas journaliers de
M. SIEBERING . Depuis son installation, il n’a cherché que des obstacles par des nouveautés inexprimables’’.
A cette époque, la commune se trouvait, d’après les écrits du maire : ‘‘dans la misère par les impôts extraordinaires et d’autres désastres affectifs’’.
L’instituteur, nommé ABT, soutenu par le curé, ‘‘voulait faire le maître en ce qui concerne les revenus communaux’’, ce que les habitants ne pouvaient accepter.
Mais, rapidement, les relations entre le curé et l’instituteur se détériorèrent au point que le curé exigea le changement de l’instituteur ainsi que celui de la sœur en charge de l’instruction des filles : l’abbé Georges SIEBERING voulait prendre la main sur toute l’éducation de la jeunesse et modeler celle-ci à son idée.
Le maire, son conseil et de nombreux habitants se mêlèrent de cette histoire et les doléances se multiplièrent. « En ce qui concerne l’inconduite de M. le desservant, cela fait crier au scandale, rajouta le maire :
‘‘Il est arrivé que différentes personnes décédées n’aient pas été enterrées pendant 3 jours. A son arrivée, on voulut savoir pourquoi il n’avait pas donné l’ordre à un de ses confrères pour faire le service pendant son absence, ce qui lui a fait répliquer que cela ne regardait personne, qu’il peut laisser les morts sans enterrement tant qu’il le veut. »
Peu à peu, la tension monta et le village tout entier se ligua contre son curé.
Afin de retrouver le calme, le maire et son conseil demandèrent purement et simplement le changement du curé.
Il semble que l’évêché n’ait pas répondu à cette lettre. Pour l’instant, Farschviller se devait de trouver un terrain d’entente avec son pasteur, … et s’en contenter.
Mais, peu à peu, les absences, répétées et prolongées du curé, vinrent à poser problème. Le 11 mars 1824, une nouvelle lettre signée par des habitants de Farschviller et d’Ellviller fut envoyée directement à l’évêque de Metz. Les auteurs de la lettre commençaient à dire qu’ils avaient perdu toute confiance en leur pasteur et rapportaient des faits graves. Une nouvelle fois, ils demandaient le changement du curé.
· L’enfant né d’en face MAYER d’Ellviller n’a point été baptisé par lui parce qu’il était absent et que, chez lui, on a voulu dire, ni où on le trouverait, ni quand il reviendrait. Cet enfant a été transporté à Hoste dont le desservant était actuellement absent, enfin à Cappel où il reçu le baptême.
· La femme de Michel CHAIN d’Ellviller était dangereusement malade : on a cherché M. SIEBERING qui était absent. De là, on s’est adressé auprès du desservant de Hoste qui l’était également ; enfin, il a fallu revenir à Puttelange. De cette manière, la femme a reçu les sacrements avant sa mort.
· Michel ALBERT de Farschviller a prévenu M. SIEBERING que sa épouse était dangereusement malade et lui a demandé de venir l’administrer. Mais M. SIEBERING, s’est attardé à l’église et cette femme est morte sans sacrement.
· Un jeune enfant décédé est resté deux jours sans être mis en terre, en raison de l’absence de M. SIEBERING.
· Pour le même motif, un enfant de Farschviller est resté exposé plus longtemps qu’il n’aurait dû.
· Jean MAYER d’Ellviller, sorti agonisant d’une carrière, fut transporté chez lui pour être administré. Il a fallu chercher M. SIEBERING à cheval. Enfin, on l’a trouvé à Béning.
· La fille de Mme LANG de Farschviller croyant n’éprouvé qu’un malaise, est malheureusement décédée sans être administrée parce que M. SIEBERING était absent.
· Georges MAYER et Antoine RISSE avaient demandé leur billet de confession pour faire leurs Pâques en 1823. Il le leur donna en disant : ‘‘Quand vous serez à l’extrémité, vous n’aurez pas besoin de me faire appeler’’.
· Le domestique de Jean GRATIUS s’est présenté pour se confesser : M. SIEBERING lui a alors demandé chez qui il servait. Sa réponse étant : ‘‘chez GRATIUS’’, le curé lui répondit : ‘‘Vas- t’en, je ne vais pas te confesser’’. Il fit de même au domestique de Christophe RISSE de Farschviller.
Cette deuxième plainte restera également sans réponse. L’évêché mettra encore quelque temps avant de réagir : il faut savoir que les évêques reçoivent régulièrement des plaintes contre leurs prêtres et que celles-ci ne sont pas toujours justifiées.
Au 19ème siècle, à quelques exceptions près, toute la population était pratiquante : le curé voyait donc ses ouailles tous les dimanches au grand complet, à la messe. La chaire était alors l’endroit rêvé pour régler ses comptes, sans que personne ne puisse répondre. On peut s’imaginer que les sermons de cette époque ne devaient pas être piqués des vers !
· Deux ans plus tard, le 1er janvier 1826, à la réunion du conseil de fabrique, M. SIEBERING fait mentionner que, par mauvais temps, il ne peut se rendre à Loupershouse et Ellviller, ni à cheval, ni à pied. La vieille querelle du siècle passé est remise sur le tapis : mais, cette fois, c’est le curé, lui-même, qui recherche le moyen de se séparer de son annexe, Ellviller. De plus, et selon ses dires, l’église de Farschviller est devenue trop petite pour accueillir les deux villages. Le conseil de fabrique remet alors, entre les mains des autorités civiles et ecclésiastiques, la demande d’excorporation de Loupershouse et d’Ellviller et propose que ceux-ci soient provisoirement rattachés à la paroisse de Hoste. Dans l’attente de la décision, ces villages continuent tout de même à participer à l’entretien du presbytère, aux frais de culte et à la réparation du cimetière.
L’année 1830 allait devenir celle du grand pugilat entre le curé et le conseil municipal. Neuf ans après l’arrivée du curé, une grande partie de la population estimait que le temps de frapper fort était venu.
Au cœur de l’été, le 16 août, une longue lettre de doléances allait être remise entre les mains de l’évêque de Metz.
Monseigneur,
Les soussignés membres du conseil municipal et principaux habitants de la commune de Farschviller, arrondissement de Sarreguemines, ont l’honneur d’exposer très respectueusement à Monseigneur, que vu l’état d’effervescence où se trouve la majeure partie du peuple, c’est-à-dire cette classe d’hommes sans frein, il est du devoir de tous les honnêtes gens d’éclairer la religion pour la mettre à même de prévenir des malheurs prêts à fondre sur la tête de M. SIEBERING, leur curé, malheur que, par leur position sociale, ils ont jusqu’à présent su empêcher. Désespérant de pouvoir toujours contenir cette masse indocile, ils prennent la liberté de citer ici très succinctement quelques circonstances qui ont occasionné la haine qu’on porte à M. le curé.
1.
Il est de fait que M. SIEBERING est depuis longtemps l’objet d’une aversion publique en raison de ses prédications furibondes dans lesquelles il anathématise les fidèles, ce qui lui a
aliéné tous les cœurs : qui le croirait.
A tout propos et pour les causes les plus frivoles, il voue les habitants à la damnation éternelle. De là, s’en est suivi une irritation générale qui cause une fermentation dans les esprits dont
il est impossible de prévoir les suites. Relativement à ce qu’ils viennent de dire, ils supplient Monseigneur d’être bien persuadé qu’ils ont su apprécier tous les raisonnements de leur curé,
mais aucune langue vivante n’a d’expression pour rendre dans toute son énergie le sentiment qu’ils éprouvent lorsque, dans la 30ème année du 19ème siècle, dans un temps où
la raison pénètre dans toutes les intelligences et la charité dans tous les cœurs, un Ministre de Paix, un Ministre de l’Evangile, ose tenir un pareil langage !!!
2. Au lieu de s’occuper exclusivement des affaires spirituelles, il est de notoriété que par son ascendance sur l’esprit du maire, il gouverne la commune. Il a même fait changer 3 fois les membres du Conseil Municipal sous le spécieux prétexte qu’ils n’étaient pas dévoués à l’ancienne dynastie.
3. Ce qui a porté l’exaspération à son comble, c’est d’avoir eu, quelques jours avant la chute des Bourbons, la témérité d’annoncer en chaire le retour des droits féodaux, principalement de la dîme, en donnant à entendre que l’intention bien prononcée de Charles X était de soutenir ce système par tous les moyens de son pouvoir, même celui de tirer l’épée.
Ils borneront à ces 3 faits principaux les griefs qu’ils signalent à Monseigneur, en le suppliant de ne voir dans leur démarche que le désir bien sincère de prévenir les avanies dont M. le Curé SIBERING pourrait être victime et qui sont toujours affligeantes lorsque c’est un Ministre de Dieu qui en est l’objet ; ils osent même l’assurer qu’ils ont déjà épargné des scènes désagréables à ce pasteur qu’il est dans son intérêt personnel et de celui de sa sûreté d’éviter. En ajoutant à ces considérations celle qu’une émeute pourrait troubler la tranquillité publique, il ne lui échappera pas non plus que la gloire et les intérêts les plus sacrés de la religion seraient gravement compromis.
Si Monseigneur daignait prendre en considération la prière qu’ils ont l’honneur de lui faire d’éloigner M. SIEBERING, leur curé, ils oseraient très humblement le supplier d’avoir la bonté de le remplacer par M. KRIMEL, actuellement curé de Hoste. Ce déplacement, qui ne serait nullement onéreux, calmerait les esprits et ménagerait tous les intérêts.
Persuadé de la justice de Monseigneur, ils osent croire qu’il daignera accorder la demande qu’ils ont l’honneur de lui soumettre, et si la reconnaissance de vrais fidèles, amis de la religion et de la paix, pouvait être de quelque prix pour un cœur comme le sien, ils le supplient de se souvenir qu’ils bénissent son nom et font des vœux ardents pour son bonheur et la conservation de ses jours.
C’est dans ces sentiments qu’ils osent se dire de Monseigneur les très humbles et très respectueux serviteurs.
Quinze jours plus tard, le 31 août 1830, une nouvelle demande est adressée à l’évêché. Mais cette fois-ci, le maire a pris les devants : il propose lui-même une place vacante pour M. SIEBERING et demande en échange que le curé de Hoste vienne à Farschviller pour calmer les esprits.
Monseigneur,
Ont l’honneur d’exposer très humblement les soussignés maire, adjoint, messieurs et membres du conseil municipal de Farschviller que M. SIEBERING, leur curé, allant à Zetting, la paroisse se trouve, par ce fait, vacante.
Si Monseigneur, comme nous en sommes convaincus, la religion et la tranquillité publique puissent être de quelque prix auprès de vous, nous osons vous prier
d’échanger
M. KRIMEL, curé de Hoste, pour la nomination pour notre commune. L’homme capable de rétablir ici la tranquillité possède la confiance générale de notre paroisse, nous ne vous dissimulons pas,
Monseigneur, si cette faveur nous serait refusée, vous exposeriez tout bon chrétien à être la victime d’un trouble d’effervescence inouï à la campagne. Persuadé que M. KRIMEL, par sa
religion et douce manière, préviendrait tout trouble quelconque.
Ne refusez, Monseigneur, pas un bien de la première nécessité que vous demande un père de famille au nom de la religion.
Un mois plus tard, le 30 septembre, le maire, Georges MAYER, envoie une nouvelle lettre à l’évêque :
Monseigneur,
J’ai l’honneur de vous annoncer que la discorde semée en cette paroisse par le prêtre SIEBERING menace une révolte ouverte et que sans des formalités prises de la retenir, elle aurait déjà éclatée. Je vous prie donc de bien vouloir donner un prompt changement à ce prêtre désastreux pour éviter les désastres dont il est l’agitateur et si vous ne daigniez pas déférer à ma prière, je me verrai forcé de me plaindre au Roi actuel qui, je crois, saura faire droit à qui il appartiendra.
Dans cette attente, j’ai l’honneur de vous saluer très sincèrement.
MAYER
Devant tant d’insistance, et la menace d’en référer au roi, l’évêché ne pouvait que s’inquiéter et proposer un autre poste à ce prêtre. Nous ne possédons malheureusement pas la réponse de l’évêque, mais il semble que la paroisse de Rech lui ait été proposée. A deux jours d’intervalle, le curé écrit deux longues lettres : une au vicaire général pour demander son changement et la seconde à l’évêque pour s’expliquer quant aux reproches qui lui sont faits.
Monsieur le grand vicaire,
J’apprends que la paroisse de Folschviller vient d’être vacante. A ce que l’on me dit, c’est une place tranquille et qui ne veut pas avoir cherché chaque moment son curé ; il y a donc espérance d’y faire le bien. Il me semble que ce serait une place point trop petite ni trop forte pour ma faible santé. Je serai très content si vous jugiez à propos de m’y nommer, s’il y a encore du temps ayant 19 ans de prêtrise et pendant ce temps deux paroisses seulement assez corrompues du commencement et où, sous mille peines et vexations, je suis enfin parvenu, soutenu de la grâce à y mettre le bon ordre et y faire le bien. J’espère de pouvoir compter enfin sur une plus tranquille en présence d’autres plus jeunes que moi.
A l’égard de Rech, je ne pouvais pas consentir de l’accepter à cause que j’ai trop de ma famille de la part de mon père défunt qui était de Sarralbe.
Dans ce moment, tout est tranquille ici, mais notre autorité civile actuelle d’ici est trop issue d’une unique famille et surtout le nommé GRATZIUS, premier de mes pétitionnaires, nouveau conseiller, beau-frère avec notre nouveau maire, ayant trop d’ascendance sur lui et sur tout le conseil. J’ai à craindre qu’il réussira de les pervertir tous, et alors le dernier mal sera le pire. Cependant pour la seule crainte, je n’ai pas encore de quitter ma paroisse et mes bons paroissiens pour peut-être tomber plus mal.
Si donc, vous ne me jugerez pas bon pour Folschviller, j’attendrai un moment plus favorable et je n’ai qu’à me tenir prêt aux persécutions qui n’ont pas encore eu lieu, mais qui peut-être sont destinées pour moi.
Par l’administration de l’hostie, le dernier hiver, j’ai tellement affaibli ma santé que je n’oserai pas accepter chaque paroisse. Cependant 4 à 500 communions ne me sont pas encore trop, mais la place doit être unique et point trop pénible.
En attendant une favorable réponse, j’ai l’honneur d’être avec le plus parfait respect.
Monsieur, votre très humble et obéissant serviteur SIEBERING, desservant de Farschviller.
Le 14 octobre 1830
A Monseigneur l’Evêque de Metz
Monseigneur,
L’honneur de mon état, ma réputation et celle de mes paroissiens, m’obligent de vous donner quelques renseignements sur la pétition toute fausse en date du 16 août 1830, qu’une douzaine de malveillants de ma paroisse ont dressé contre moi.
D’abord, je rétorque leurs accusations, car il est facile de voir que c’est justement ce petit nombre des pétitionnaires, ou plutôt quelques uns seulement d’entre eux qui sont ce ……………………ou selon eux sans frein et indociles et que j’ai plutôt à craindre, que toute l’autre masse qui ne m’a pas encore fait du mal et ne me fera pas non plus.
Que les pétitionnaires se contiennent eux-mêmes ou plutôt que l’autorité les corrige et dès lors, l’ordre, la paix et la tranquillité de ma paroisse ne seront plus troublés. On n’a qu’à revoir leurs pétitions depuis nombres d’années réitérées, mais chaque fois réfutées, contre l’ancien maire, un brave homme, et on verra que les mêmes y figurent toujours et on aura trouvé les troubleurs de notre paix.
C’est la première pétition qu’ils vous adressent contre moi certes, s’ils savaient quelques faits de vrai et fondé contre moi, ils ne l’auraient pas oublié de l’y mettre, au lieu de la remplir de mensonges et de calomnies.
De nouveau, s’ils seraient encore écoutés, ou point corrigés. Sur ce certificat, je ne voulais point prendre les noms d’une quarantaine d’hommes mariés ou de veuves ne sachant point écrire ainsi que de quelques autres qui n’osaient pas signer étant parents les plus proches des pétitionnaires, ou leurs journaliers, ou menacés d’eux. Ils me protestèrent cependant tous ne savoir rien contre mes fonctions et ma conduite. En présence de deux témoins, Joseph BOULLING et Jean-Pierre OMSELS, mariés, le nouveau maire, disant ne rien savoir non plus contre moi, me promit de vouloir aussi signer mon certificat, mais, à la fin, ils n’osaient plus, crainte de tomber en discorde, en disgrâce avec les pétitionnaires, dont les auteurs et les plus méchants, GRATZIUS et Jean Nicolas MAYER, sont beaux-frères et cousins avec lui. Ces deux auraient déjà longtemps excité et irrité tout le monde contre moi, si leur aurait été possible, mais grâce à Dieu, ils n’y peuvent pas réussir. Ledit GRATZIUS, tête des pétitionnaires, ne pense, ne veut et ne cherche depuis longtemps que du mal et n’empêche que le bien. Si possible lui est, à peine que depuis quelques jours, il est rentré dans le conseil municipal et voilà déjà le modique traitement de 60 francs de la sœur d’école et 60 francs de secours à la fabrique effacés sur le budget, et le chantre et instituteur, depuis huit ans tranquille dans son traitement, chicané. De sorte que la sœur, n’ayant rien d’autre pour vivre que 12 sols par enfant, pendant tout l’hiver, dont la moitié ne sera pas payée, en cas de quitter, et les filles sans instruction. A l’égard de ce que M. le Sous-Préfet vous a écrit, il n’y en a pas la moindre chose, ni le moindre soupçon, ce n’est qu’une invention diabolique de la part d’un tout mauvais sujet et j’en ai répondu à lui. Les pétitionnaires ont beau à demander M. KRIMEL, curé de HOSTE, étant de leur famille.
N’ayant contre moi ni à craindre que les seuls Jean GRATZIUS et Jean Nicolas MAYER pétitionnaires, les autres n’ont pas su ce qu’ils signaient, même Antoine RISSE m’a protesté n’avoir rien signé contre moi, mais que l’on lui avait dit que c’était une pétition contre l’ancien maire, et voilà comment on escroque les signatures.
Je ne crois pas devoir quitter à cause d’une petite douzaine de malveillants, tout le reste, plusieurs centaines de paroissiens, surtout dans ce moment afin que la malice ne triomphe pas. Mais puisque ledit GRATZIUS me menace de tout manière, qu’importe l’autorité de M. le Préfet de vouloir écrire au maire de prévenir ce GRATZIUS qu’il sera obligé d’être responsable tant pour mes biens que pour ma personne. Si quelque meute sera excitée par lui ou éclatera. Car si lui et l’autre se verront forcés d’être tranquille, aucun mal ne m’arrivera.
Ce sont les renseignements naïfs et loyaux qu’à l’honneur de vous donner à Monseigneur, votre très humble et obéissant serviteur,
SIEBERING, curé de Farschviller.
Le 31 octobre 1830, le maire des communes de Barst et Marienthal intervient auprès du vicaire général de l’évêché de Metz en faveur du sieur MAYER, maire de la commune de Farschviller, et appuie la demande de l’obtention du curé de Hoste au poste de Farschviller.
Pendant ce temps, le maire fait envoyer le sergent de Police pour annoncer au curé qu’il dispose d’un délai de 8 jours pour quitter le presbytère en y laissant le reste du foin et du bois. Une faction sera mise en place pendant la nuit pour veiller à ce que rien ne disparaisse du presbytère. La situation vient d’atteindre son comble. Il faut que quelque chose se passe !
Le 4 janvier 1831, le préfet en personne intervient enfin.
Dans la lettre adressée à l’évêque, il demande à celui-ci d’éloigner le curé du village.
Monsieur l’Evêque,
Je viens encore vous entretenir des plaintes portées contre le desservant de Farschviller.
J’ai l’honneur de vous renvoyer la lettre de cet ecclésiastique que vous avez bien voulu me communiquer et j’y joins celle que le Maire a écrite à M. le Sous-Préfet de Sarreguemines. Ce dernier magistrat persiste à penser qu’il est de toute nécessité de changer le desservant et son opinion se fonde, non sur ce que lui a exposé le Maire de Farschviller, que l’on pourrait supposer être l’ennemi du curé, mais sur les renseignements auprès des personnes notables des communes voisines. Pendant 15 jours, dit M. le Sous-Préfet, le desservant, se disant malade, n’a pas paru à l’église, cependant on l’a vu à la promenade.
Agréez, Monsieur l’Evêque, l’assurance de ma respectueuse considération. Le Préfet
Mais rien ne change, M. SIEBERING est encore maintenu à son poste.
Même une lettre datée du 26 janvier 1831, provenant du Ministère de l’instruction et des cultes, n’y changera rien.
Monseigneur, une plainte m’a été adressée contre le desservant de Farschviller et il en résulte des renseignements que j’ai recueillis sur le compte de cet ecclésiastique qu’il s’est attiré ………… de la plupart de ses paroissiens non seulement par son opposition ouverte au gouvernement, mais encore pour le scandale de sa conduite privée.
Il nous paraîtra peut-être juste de provoquer, à l’égard de ce desservant, l’application des dispositions du décret du 17 novembre 1811, relatif aux curés et desservants éloignés de leurs paroisses pour cause de mauvaise conduite.
Il serait indispensable dans tous les cas de rendre la paix à la commune de Farschviller d’y envoyer le plus tôt possible un autre pasteur.
Mais pourquoi avoir maintenu M. SIEBERING à son poste malgré toutes ces tensions ?
Peut-être la raison est-elle à chercher dans l’enquête que l’évêché fit mener par un certain THIEL de Farschviller.
Monsieur le Vicaire Général,
En réponse de votre honorée du 2 novembre que j’ai reçue le 7 novembre seulement, j’ai l’honneur de vous donner quelques
renseignements que j’ai pu avoir à Farschviller où je suis allé à vos ordres communiquer à
M. SIEBERING, la pétition reçue contre lui.
Il est confirmé par le témoignage unanime que les griefs trop ridicules et trop impertinemment intentés à
M. SIEBERING résistent nullement et que c’est la pire malice, qui, sous la marque d’apparentes condoléances et d’une simulée protection fait inventer tout moyen possible à des hommes d’une
certaine classe pour éloigner d’eux un curé zélé qui, sans vouer à la damnation éternelle ceux qui ne veulent pas s’y vouer eux-mêmes, prêche, il est vrai, des vérités qui, peut-être, ne plaisent
pas à tout le monde, mais en restant pas moins vérités, même la trentième année du 19ème siècle et si on veut encore après les 3 grandes journées de juillet, quoique la raison
pénètre toutes les intelligences.
Quant à la dîme, M. SIEBERING a justement fait le contraire de ce qu’on lui impute sur cet article.
Ayant appris que le faux bruit qui court que les prêtres dissimulent la dîme, il a expliqué à ses paroissiens que jamais à …………ni moi à penser à cette démarche.
Il est surprenant que les signataires de cette pétition ne connaissent pas mieux leur métier. Le plus grand nombre en est cependant pétitionnaires par profession. Leurs coups ne se dirigent pas seulement contre le curé mais aussi contre le maire et, s’il a le malheur de ne pas être d’accord avec eux et s’ils ont tardé de venir à leur but jusqu’à ce moment-ci, ce n’est pas à défaut de pétitions dont l’une paraît si ……… que l’autre et dont le nombre pourrait servir à tapisser bien joliment tout un appartement : aujourd’hui qu’ils ont été reçus au nombre des conseillers municipaux malgré le lien de parenté entre eux que la loi réprouve et commence déjà à avoir une heureuse influence dans les affaires de commune. Déjà, ils ont rayé au budget le traitement de la sœur d’école qui probablement ne pourra plus subsister à l’avance. Il est à croire que M. le Sous-Préfet n’est pas instruit de leurs illégalités qu’ils sont parents ensemble et avant le maire actuel sans quoi il ne tolérerait pas cet abus qui est si inavantageux à la commune.
Pour ce qui regarde la noire calomnie fabriquée sur le compte de M. SIEBERING par rapport à la fille du maire on en dit mot au village : cette fille reste chez ses parents et ne s’est jamais
absentée de l’endroit, excepté avant quelques années elle était pendant quelque temps au couvent de M. DEKER avec intention de se destiner à l’état de sœur d’école. Mais comme M. DEKER ne trouve
pas sa santé assez forte, il était obligé de la renvoyer chez elle et, depuis ce temps, elle n’a plus quitté sa maison paternelle.
M. SIEBERING vous enverra le certificat que vous désirez et vous donnera des détails de sa pétition.
Je vous envoie ci-joint la pétition qui ne peut que prouver qu’en faveur de l’Abbé SIEBERING.
En vous priant de vouloir bien agréer mes sentiments les plus respectueux.
J’ai l’honneur d’être avec un parfait dévouement, M. le Vicaire Général, votre très humble serviteur.
THIEL de Farschviller
Il semble bien qu’après la lettre du ministre des cultes, le calme, ou un semblant de calme, soit revenu au village, puisque plus aucune plainte n’est plus parvenue à l’évêché. Georges SIEBERING fut maintenu à son poste jusqu’en 1841.
Il nous est aujourd’hui difficile de pouvoir déterminer avec justesse la part de vérité que contiennent toutes ces pétitions.
Durant deux décennies, le village a connu de terribles tensions et de tragiques divisions qui ont empoisonné la vie de bien des gens. Quel dommage !
S’il est sûr que les curés ne sont pas tous des saints, … leurs paroissiens ne sont pas tous des anges.
Il grandit dans la ferme familiale et entra au séminaire de Metz, où il y sera ordonné prêtre, le 15 juillet 1883, à l’âge de 26 ans.
Trois mois plus tard, son évêque, Mgr Paul-Georges-Marie DUPONT des LOGES, l’enverra comme vicaire du vieux curé de Farschviller, l’abbé Michel-Stanislas MULLER, alors âgé de 76 ans. Le village n’avait plus connu de vicaire depuis le départ de Georges GREFF, le 11 octobre 1792.
L’abbé MULLER prit sa retraite, le 20 octobre 1889, mais demeura au presbytère de Farschviller jusqu’à sa mort, en 1891.
Son fidèle vicaire l’assista jusqu’au bout. Reconnaissante pour tout le travail accompli dans la paroisse et, notamment la construction de la nouvelle église Saint-Denis, la commune offrit à l’abbé MULLER son monument funéraire et le fit ensevelir à côté de l’entrée de la chapelle de la tour de la Mutterkirche. Bien que la coutume d’enterrer les prêtres dans leur église soit passée de mode, les Farschvillérois souhaitaient que leur vieux pasteur repose au plus près de Celui qu’il avait servi toute sa vie durant : aussi, l’abbé MULLER sera donc inhumé près de la Mutterkirche.
Le 12 janvier 1891, l’abbé Paul BONAVENTURE, maintenant âgé de 34 ans, succéda à son curé.
Aujourd’hui, peu se souviennent de lui et peuvent encore témoigner sur sa personnalité et son zèle apostolique. Mais, à en croire le nombre de vocations presbytérales à Farschviller, entre 1883 et 1928, date de sa mort, il est clair que Paul BONAVENTURE devait être un personnage marquant et, sans aucun doute, estimé et apprécié.
A ce jour, il m’a été possible de retrouver 7 enfants du pays à avoir été ordonnés prêtre de son vivant :
Jean-Gustave PITZ en 1896,
Gabriel BALZER en 1914,
Jean Joseph BOUR en 1897,
Jean-Nicolas MICHEL en 1898,
Auguste-Joseph HAMANN en 1902,
Nicolas-Casimir MARON en 1919,
Henry MAYER en 1927.
Paul BONAVENTURE décéda le 21 janvier 1928, âgé de 71 ans.
Il aura passé 43 ans dans notre village ; jamais aucun autre prêtre ne restera aussi longtemps.
A sa mort, il sera veillé par ses paroissiens, jours et nuits jusqu’aux funérailles : les femmes, de jour et les hommes, de nuit.
Le jour, les femmes priaient le chapelet pour le repos de l’âme de leur pasteur et, la nuit, les hommes préféraient jouer aux cartes autour de sa dépouille en buvant de l’eau de vie.
Les anciens se souviennent du regrettable incident qui survint l’une de ces nuits. Cela a dû se passer au petit matin. Ayant certainement un peu trop bu et sans doute pris dans un élan de gagnants, « on » renversa le cercueil et le défunt roula au sol. Après l’effet de surprise, et peut-être quelques jurons, le curé reprit sa place initiale avant de trouver, aux côtés de son prédécesseur, un repos éternel quelque peu moins mouvementé.
La commune, reconnaissante, lui offrit une pierre tombale.
L’ABBE JEAN SCHUTZ
18 mars 1928 – 20 décembre 1960
L’année 1928 fut marquée par trois grands événements : l’arrivée de M. Joseph JACQUEMIN, le nouvel instituteur et successeur de M. HIEBEL, l’arrivée de Mme Marthe SIMON, la nouvelle sage-femme et l’arrivée de l’abbé Jean SCHUTZ.
Le 21 janvier, l’abbé BONAVENURE, curé de Farschviller depuis 1883, décède. Mgr PELT nomme alors le curé de Volmerange-les-Mines à ce poste vacant.
Le 14 mars, l’abbé Jean SCHUTZ et sa mère, Catherine KIEFFER, sont accueillis en gare par l’ensemble du conseil municipal. Quatre jours plus tard, il sera installé comme prêtre résident de Farschviller. A ce moment, il ne se doutait certainement pas qu’il y resterait, tout comme son prédécesseur, jusqu’à sa mort.
La succession ne fut pas aisée, car il lui fallait remplacer un prêtre qui avait profondément marqué la paroisse durant 45 années de présence.
Le nouveau prêtre eut fort à faire en cette relative grande paroisse : la messe quotidienne, les deux messes du dimanche matin, les vêpres de l’après-midi et les complies du soir, le chapelet, le catéchisme de tous niveaux, le bréviaire, le jardin, les visites aux paroissiens, les longues heures de confession …
Homme au caractère bien trempé, de concert avec M. le maire, il tenait fermement les commandes du village. Soucieux des âmes qui lui étaient confiées, son ‘‘service de renseignement’’ l’informait régulièrement sur les villageois, lecteurs du journal du parti communiste, grand danger pour la foi.
Rien ne lui échappait et il n’avait peur de rien, ni de personne. Souvent plus craint qu’aimé, sa grande taille et sa noire soutane inspiraient le respect de tous. Mme Victorine CHAMPLON, sa gouvernante, vivait à ses côtés et veillait sur son bien-être.
Le 19 juillet 1959, le village tout entier se mobilisa pour organiser le jubilé sacerdotal du curé.
Le 20 décembre 1960, 18 mois après son jubilé, suite à une fracture du col du fémur, l’abbé Jean SCHUTZ décéda au presbytère.
Son fidèle ami, Joseph JACQUEMIN, le veilla dans son agonie.
Pour ses funérailles, l’église Saint-Denis ne put contenir tous les paroissiens. Reconnaissants, les habitants de Farschviller offrirent une pierre tombale à celui qui fut leur pasteur pendant plus de 32 ans.
ARRIVEE DE L’ABBE MONNET
- 1er avril 1961 -
Le 20 décembre 1960, à l’âge de 77 ans, l’abbé Jean SCHUTZ décède.
De Noël jusqu’à l’arrivée de l’abbé MONNET (son successeur), c’est le père BEHR, originaire de Loupershouse, qui assurera l’intérim.
Le 1er avril 1961, arrive enfin l’abbé Alfred MONNET.
Après 15 années de ministère, le jeune prêtre est nommé, par son évêque, curé de Farschviller.
Après 32 années de tradition fortement ancrées par l’abbé SCHUTZ, son prédécesseur, un nouveau vent souffle désormais sur la paroisse.
Au placard, les vieux ornements ! La garde-robe sera entièrement renouvelée. Fini le ‘‘tout latin’’ ! Désormais, on chantera aussi en français et en allemand. Les funérailles seront célébrées en classe unique. Les vêpres ne seront chantées que les seuls jours de fêtes.
Le nouveau prêtre sera tout particulièrement apprécié par la jeunesse, et plus particulièrement, par les enfants de chœur.
Un an après son arrivée, le 10 octobre 1962, le pape Jean XXIII convoque le second Concile du Vatican. 2500 évêques réfléchiront à la réforme de l’Eglise.
Dès la fin du Concile, en 1965, l’abbé MONNET mettra en pratique la nouvelle réforme liturgique : la messe sera célébrée en français. Les fidèles devront apprendre les nouveaux répons : ‘‘Et cum spiritu tuo’’ sera remplacé par ‘‘Et avec votre Esprit’’. Les plus anciens en perdront leur latin !!!
A côté du travail pastoral, l’abbé MONNET s’attaquera à la transformation et à la modernisation du presbytère. Le vieux puits sera muni d’une pompe électrique acheminant l’eau directement à la cuisine, aux deux salles de bain ainsi qu’aux toilettes désormais placées à l’intérieur. Bien que n’ayant pas son permis de conduire, il transformera la vieille grange en garage.
Issu d’une famille ouvrière et d’un père fermement attaché aux valeurs communistes, l’abbé MONNET connaît et sait estimer la valeur du travail. Il s’intéresse à la vie de ses ouailles et les visite fréquemment.
En 1965, il s’investira beaucoup pour les prémices sacerdotales de l’abbé Georges FLAUSSE. Il mettra à l’œuvre tous ses talents afin que cette célébration soit parfaite. Pour diriger la chorale, il fera appel à Lucien MULLER, un ami et un prêtre particulièrement mélomane, qui, à cet instant précis, ne se doute pas qu’il lui succédera quatre ans plus tard.
Alfred MONNET avait mis tout son cœur et toute son énergie à transformer sa paroisse, à la conduire d’une époque révolue à un présent que la jeunesse allait marquer durablement par la ‘‘révolution de mai 1968’’.
A son départ, le 1er juillet 1966, Farschviller ne sera plus comme avant…
L’ABBE LUCIEN MULLER
Septembre 1968 – Septembre 2001
Après le douloureux départ de l’abbé WAGNER, Mgr Paul Joseph SCHMIDT nomma Lucien MULLER comme nouveau curé de la paroisse, avec comme unique directive : calmer les esprits.
L’abbé Lucien MULLER, originaire de Metz Sainte-Thérèse, entra au séminaire, tout comme l’avaient fait ses deux frères aînés.
Comme beaucoup de séminaristes de cette génération, il passa d’abord par le petit séminaire pour poursuivre dans le grand.
Toutefois son temps d’études fut interrompu par la guerre.
Sans avoir vraiment vécu sa jeunesse, après le temps éprouvant de la guerre et de la captivité, il se retrouva prêtre à 27 ans.
Ordonné en 1948 à la cathédrale de Metz, il fut nommé vicaire de l’abbé LAUER à Freyming. C’est à ce moment-là qu’il fut amené à rencontrer régulièrement, lors des réunions d’archiprêtré, l’abbé SCHUTZ, curé de Farschviller. Lucien MULLER connaissait bien ce village, l’une de ses tantes y résidant. Jeune prêtre, séduisant et moderne, il fit sensation dans son ministère. L’abbé SCHUTZ lui fit même un jour la remarque suivante : ‘‘Jamais tu ne pourras être curé de Farschviller’’.
A l’occasion de la première messe de l’abbé Georges FLAUSSE, le père MONNET fit appel à l’abbé MULLER pour diriger la chorale, pour la messe et les vêpres. Il s’agissait d’exécuter une messe à quatre voix mixtes et sans faute. Lucien MULLER était l’homme de la situation. C’est alors qu’il fit la connaissance des choristes et apprécia leurs qualités vocales.
Quatre ans plus tard, en dépit de la ‘‘prédiction’’ du curé SCHUTZ, Lucien MULLER fut nommé dans notre village.
Intellectuel et musicien, le nouveau prêtre se fit surtout remarquer par ses homélies et ses talents de compositeur et mélomane qu’il mit volontiers au service de la chorale et de ses paroissiens.
N’étant que fort peu manuel, incapable de tenir un outil, il n’apporta que très peu de véritables modifications à l’église et au presbytère, mais il améliora la qualité des prestations musicales des services religieux.
Il commença par faire descendre la chorale de la tribune pour l’installer dans le chœur, afin de l’avoir à sa proximité et mieux la diriger. Plus tard, en 1978, il fit retirer le maître-autel et le fit retailler à ses dimensions actuelles. Le fond du chœur étant désormais libre, la chorale put alors s’y installer plus confortablement.
Afin de permettre une meilleure vue, la chaire à prêcher fut également ôtée.
Petit-fils de typographe, il en avait hérité la passion. Les missels furent supprimés et chaque dimanche, durant 33 années, l’abbé MULLER imprima des feuilles de chants.
Cet homme avait profondément marqué ma jeunesse. Il fut pour moi un exemple à suivre. Homme au caractère parfois difficile et décapant, il me semble que j’ai quelque peu hérité de son petit ‘‘travers’’ et beaucoup emprunté à sa pastorale.
Même si Lucien MULLER cultivait la discrétion, il me semble que sa vie, solitaire et quelque peu austère, lui ait beaucoup pesée.
Durant toutes mes années de séminaire, il ne m’a jamais encouragé à l’imiter. Il me disait souvent que la prêtrise était une vie difficile et qu’il ne pouvait, en aucun cas, influencer mon choix personnel.
Le jour de ma première messe, c’est heureux qu’il m’offrit sa croix en prononçant des paroles qu’il avait légèrement modifiées : « Fabrice, reçois la croix du Seigneur. Ne traîne pas ta croix, mais porte-la. »
Lucien MULLER souhaitait rester le plus longtemps possible à Farschviller.
Lorsque l’heure de la retraite sonna, Mgr RAFFIN lui permit de rester encore à son poste jusqu’à ma première messe.
Malgré l’âge et la fatigue, il demeura encore à Farschviller pour y accueillir le père AUGUSTIN, son successeur
Marqué par la maladie de Parkinson, ne pouvant plus rester seul, il se retira dans une maison de retraite, proche de sa famille, à Yutz.
De passage à Thionville, je l’ai rencontré quelques jours avant sa mort.
Ses obsèques furent célébrées à Yutz et son corps repose auprès des ses frères prêtres, au cimetière d’Apach.
Le 27 juillet 2007, dans une église comble, j’ai célébré une messe à son intention en l’église Saint-Denis de Farschviller où il fut pasteur durant 33 années.
SŒUR MARCELLINE
Le 7 décembre 1970, la paroisse de Farschviller a été représentée par une bonne cinquantaine de personnes à l’enterrement de Sœur Marcelline, au couvent de Saint Jean-de-Bassel.
La défunte méritait bien ce geste de reconnaissance, car rares étaient les maisons où elle n’avait pas eu à soigner un malade au cours de ses 33 années de présence au sein de la commune.
Le 13 octobre 1923, Sœur Marie-Marcelline LORICH arriva à l’école des filles, employée en tant que ménagère et garde-malade. Elle avait installé sa pharmacie au logement des sœurs.
A cette époque, on ne recourait au médecin que lorsqu’on avait déjà ‘‘un pied dans la tombe’’. Aussi, pour toute maladie ou blessure, on recourait à la ‘‘Krankenschwester’’, Sœur Marcelline.
Simple, effacée, mais toujours disponible, d’un dévouement à toute épreuve, elle parcourait à pied les rues du village pour mener sa guerre contre la douleur.
C’est avec émotion que M. JACQUEMIN, l’instituteur, évoqua l’anecdote illustrant le courage de la religieuse :
‘‘En 1944, même au cours des bombardements les plus intenses, elle quittait la cave du presbytère qui servait d’abri à plusieurs familles, pour accomplir ce qu’elle considérait comme son devoir. Si on lui recommandait la prudence, elle répondait : Je n’ai pas peur, je me fais toute petite pour longer les murs.’’
En 1956, elle retrouva son couvent pour y jouir d’une retraite bien méritée.
En 1965, elle revint au village pour la première messe de l’abbé FLAUSSE et chacun des paroissiens voulut la voir, la saluer, lui parler.
Le jour de ses funérailles, une religieuse raconta que, chaque soir, Sœur Marcelline envoyait sa bénédiction dans la direction de Schorbach, son village natal, et de Farschviller où elle avait laissé une grande partie de son cœur : cet attachement était partagé par toute la population.