SEPARATION DE CAPPEL
ANNEXE DE LA PAROISSE DE FARSCHVILLER
Depuis des siècles, le petit village de Cappel était une annexe de la paroisse de Farschviller.
Cappel possédait une chapelle qui, selon les archives, était en mauvais état. Au clocher, une horloge mécanique donnait l’heure. Dans la chaire à prêcher, une inscription datait de 1619.
Depuis la guerre de Trente ans (1618-1648), la plus grande partie du village était en ruine.
Vers 1700, Cappel ne comptait plus que 24 habitants, mais avait tout de même deux maires. Distant d’une dizaine de km de Farschviller, il était souvent difficile au curé d’accéder à Cappel, son annexe, surtout durant les mois d’hiver.
Les habitants de Cappel envoyèrent donc une lettre de doléances au Baron de MAHUET aux fins d’obtenir, à leur charge, un vicaire-résident.
Le 21 juin 1712, arriva enfin l’accord de l’évêque de Metz, et le sieur Jean COLT devint le premier vicaire-résident du village.
Henry Charles du CAMBOUT par la permission de Dieu, évêque de Metz, Duc de COISLIN, Pair de France, Baron des anciennes baronnies de Pontchâteau et de La Roche-Bernard , Pair et Président -né des Etats de Bretagne, premier Baron de Champagne, comte de Crécy et autres lieux, premier aumônier du Roy et commandeur de l’ordre du Saint Esprit. La requête à nous présentée par leurs maires habitants et communauté du village de Cappel de la paroisse de Farschviller aux fins d’obtenir un vicaire qui dira les messes et fera le service …………..y baptisera les enfants, décret de l’un de nos vicaires généraux donnée en notre absence le 18 avril dernier portant que ladite requête sera communiquée au sieur décimateur et au sieur curé de Farschviller pour y répondre dans un mois. Notre décret du 8ème jour du précédent mois porte, qu’après avoir entendu le sieur curé communiquer ses réponses au député desdits habitants et ouïe sa réplique sur laquelle nous avons commis le sieur du lieu curé de Faulquemont pour se transporter sur les lieux et informer souverainement sur la commodité ou incommodité de l’établissement d’un vicaire audit Cappel, procès-verbal de visite et information sommaire faite par ledit sieur du lieu le 4ème du précédent mois en présence des parties …………………. Appelle carte topographique de la paroisse de Farschviller dressé ledit jour pour l’ordonnance du sieur du lieu et en présence des parties par Kipper arpenteur juré et en titre d’office de Sarreguemines de tout considérer. Nous avons ordonné et ordonnons qu’il y aura un vicaire amovible audit lieu de Cappel pour y célébrer la Sainte messe, instruire les paroissiens tant au prône qu’au catéchisme administrer les sacrements et faire les autres fonctions. Pour la direction dudit sieur curé de Farschviller et de ses successeurs lesquels pourront comme du droit venir audit Cappel toutes les fois qu’ils le jugeront à propos pour y célébrer les messes instruire et faire toutes les fonctions pastorales et envoyer ledit vicaire à Farschviller y faire les mêmes fonction en leur place.
Lequel vicaire aura pour sa subsistance la rétribution assignée de droit aux vicaires amovibles qui lui sera payé par qui lui appartiendra
…………………..les parties en convenir à l’amiable à quoi nous les exhortons ……………….néanmoins par les présentes exemples en façon quelconque les habitants dudit Cappel de toutes les charges auxquels ils sont asservis envers la mère église, le luminaire, la maison curiale et autres obligations communes aux paroissiens, ordonnons qu’avant l’exécution du présent établissement et à la nomination dudit vicaire desdits habitants.
Jusque alors, le prêtre résidait à Farschviller et obtenait, pour l’administration de Cappel, une rétribution annuelle de 150 francs.
Avec un vicaire-résident, les Cappélois n’avaient plus à faire le long trajet, souvent dans des conditions difficiles, pour se rendre à Farschviller pour assister aux offices, pour la célébration des sacrements ou pour les funérailles.
Avec la nomination du sieur Jean COLT, le sieur Henri PARENT, curé de Farschviller se voyait libéré d’une bien lourde charge. Maintenant c’est au tour du jeune vicaire de se déplacer pour rendre compte à son curé. Cappel reste toutefois encore rattaché à la paroisse de Farschviller.
Le procès-verbal du 27 juillet 1763 nous donne de précieux renseignements sur l’état et la vie de la communauté de Cappel.
Bien qu’ayant acquis une certaine indépendance en matière de la vie religieuse, les habitants de Cappel n’étaient pas pour autant coupés de Farschviller. Le moulin, les commerces, rien n’avait changé. Farschviller restait toujours le centre commercial et peu d’activités échappaient à cette règle comme en témoigne ce que l’on appelait ‘‘le procès du moulin’’.
A cette époque, chaque village possédait ses bergers. Au lever du soleil, ils soufflaient dans une corne pour signaler le départ des troupeaux. Les propriétaires ouvraient leurs étables et lâchaient les animaux. Les bergers faisaient le tour du village pour récupérer le bétail afin de le faire paître dans les prairies communales. Le soir, ils rendaient les troupeaux à leurs propriétaires. Cette activité était devenue un véritable métier et chaque propriétaire participait à leur rémunération.
Le 5 décembre 1732, Nicolas ZINGERLE, le meunier de Farschviller, entama une procédure juridique à l’encontre des bergers du village car ceux-ci refusaient de venir prendre ses bêtes, arguant du trop grand éloignement du moulin par rapport au reste du village.
Le tribunal lui donna raison : toutefois, le document ne faisait aucune mention du petit bétail. Les bergers venaient donc récupérer le gros bétail (bovins, équidés, …), mais ils refusaient de s’occuper du petit bétail (ovins, caprins ...). Afin d’obtenir la paix et de rétablir une bonne entente avec le meunier, les Farschvillérois donnèrent l’autorisation à son petit bétail de paître sur les prairies et dans la forêt de la commune, tout proche du moulin. Cet accord fut enregistré et pris en compte au tribunal.
Mais, à cette époque, la forêt était encore en indivision entre Farschviller et Cappel. Or, les habitants de Cappel qui, sur cette affaire, n’avaient pas été consultés, s’opposèrent à cet accord, et ce qui devait arriver arriva.
Un jour, les gardes-forestiers de Cappel trouvèrent le troupeau du meunier dans la forêt. Sans crier garde, ils le réquisitionnèrent.
Furieux, Nicolas ZINGERLE s’empressa de demander réparation auprès du tribunal de Sarreguemines. Celui-ci stipula, dans son jugement, que la commune de Farschviller n’avait pas fait notifier les termes de l’accord particulier.
Le meunier ne voulut pas en rester là : il relança un nouveau procès et le 18 novembre 1733, l’intégralité de son troupeau lui fut rendu.
Blessé dans son amour propre, le village de Cappel porta l’affaire devant le tribunal de Nancy et obtint l’annulation du précédent jugement : après plus d’une année de procédure, Nicolas ZINGERLE perdit l’affaire et dut payer tous les frais de justice.
Et à partir de ce jour, et pour bien longtemps encore, les habitants de Cappel ne purent obtenir de la farine de blé auprès du meunier de Farschviller … et ils durent se contenter de pain noir.
Plus tard, avec la nouvelle restructuration paroissiale, Cappel devint enfin une paroisse autonome. Peu à peu, des commerces s’y installèrent : la distance entre les deux villages semble s’accroître au point que, déjà au 19ème siècle, plus aucun lien n’existait entre les 2 villages.
SEPARATION PROGRESSIVE D’ELLVILLER,
ANNEXE DE LA PAROISSE DE FARSCHVILLER
Tout comme le fut Cappel, Ellviller a été, des siècles durant, une annexe de la paroisse de Farschviller.
Les deux hameaux possédaient une petite chapelle. Celle d’Ellviller, qui était dédiée à Saint Hubert, a été reconstruite et agrandie en 1733.
La messe y était célébrée tous les dimanches et jours de fête et, notamment, le jour de la fête de Saint Hubert. Ce jour-là, dans tout le village, personne ne travaillait afin que tous, y inclus pâtres et domestiques, puissent participer à la messe. Tout ceci était parfaitement bien rodé jusqu’à l’arrivée, en 1726, de Jean Mathias GOUVIENNE, nouveau desservant de Farschviller.
Depuis qu’en 1712, suite à leur requête, les habitants de Cappel avaient obtenu un vicaire-résident, les habitants d’Ellviller revendiquaient l’octroi du même privilège.
Le maire, suivi de quelques notables, se lança dans les procédures, mais le nouveau curé ne l’entendit pas de cette oreille. Homme de caractère et pasteur responsable, le sieur GOUVIENNE n’avait nullement l’intention d’entrer dans ce petit jeu et tenait fermement les rênes de son pouvoir. Une petite guerre sur le mode des relations entre ‘‘Don Camillo et Péppone’’ s’engagea alors pour plus d’un siècle.
Dès 1740, un ballet de plaintes, de requêtes, de lettres et de procès-verbaux circula entre le curé, le maire, l’évêque de Metz et différents archiprêtres. L’affaire fut même portée devant la Cour du Roy Stanislas à Nancy.
Peu à peu, le village d’Ellviller se divisa entre le camp du maire (qui préparait ses pions pour l’installation d’un vicaire-résident) et le camp du curé (qui, requête après requête, démontait tous les arguments de l’opposition).
Finalement, le feu fut mis aux poudres avec une ordonnance émanant de l’évêché, qui permettait aux prêtres de célébrer la fête des saints mineurs, non pas le jour même, mais le dimanche suivant celle-ci.
Le sieur GOUVIENNE annonça donc au prône de la grand messe d’Ellviller, que la fête de Saint-Hubert serait reportée au dimanche suivant à 10 heures en l’église mère de Farschviller. Pour la première fois, Saint Hubert ne serait pas fêté le jour dit en sa chapelle.
Furieux, le maire décida d’en faire une affaire personnelle. Après en avoir référé à l’évêque de Metz, il demanda à la Cour Souveraine de Lorraine et Barrois de faire accorder un vicaire-résident à Ellviller. L’évêché fit étudier l’affaire par M. HIEROMINY, curé de Bambiderstroff, qui occupait les fonctions d’archiprêtre de Saint Avold et de commissaire ecclésiastique.
Pour sa défense, le curé GOUVIENNE rétorqua qu’Ellviller ne se composait que de 13 ou 14 familles, soit environ 35 ou 36 communions le dimanche, sans compter 8 ou 9 domestiques et pâtres. Quant aux 3 villages d’Ellviller, Johannesweiler et Farschviller, ils comptaient au total près de 200 communions. Selon M. GOUVIENNE, un seul prêtre pouvait donc parfaitement assurer cette charge.
Voyant que l’affaire menaçait de s’enliser, le maire revint à la charge en affirmant qu’il était difficile, voire impossible aux chrétiens d’Ellviller de se rendre aux offices à l’église mère de Farschviller, le chemin reliant ces deux villages étant impraticable par temps de pluie. De plus, il fallait traverser un ruisseau qui ressemblait à un véritable canyon. D’ailleurs, en 1741, un prêtre de Bebelsheim affirma s’y être presque noyé en tombant du pont.
A ceci, le curé GOUVIENNE répondit que le chemin menant d’Ellviller à Farschviller était praticable par tout temps : en effet, il n’y avait ni forêt ni montagne à traverser, mais seulement un fossé large d’environ 4 pieds sur lequel il y avait un pont composé de deux gros arbres coupés en quatre, de façon à ce que deux personnes puissent passer de front.
L’eau qui passait sous ce pont venait d’un moulin qui n’était en fonction que 4 à 5 mois par an, hors lesquels il était à sec. Aucune autre source ne se jetait dans le fossé et l’eau ne recouvrait jamais le pont. Tous, même les personnes âgées pouvaient emprunter ce chemin pour se rendre à la paroisse.
Mais l’histoire ne devait pas en rester là. L’évêché ordonna une nouvelle fois qu’une enquête sérieuse fut menée.
Le 25 janvier 1741, suite à l’ordonnance du curé de Bambiderstroff, Nicolas BECKER, arpenteur géomètre à Saint-Avold, fut nommé pour faire la toisée de la distance existant entre la chapelle d’Ellviller et la mère église Farschviller. Il s’avéra que la distance entre ces deux sites était de 12.030 toises, mesure de Lorraine, soit ¾ de lieue.
Et durant encore 7 décennies, un nombre impressionnant de requêtes, d’enquêtes et de procès animeront la vie paroissiale du village.
Plusieurs prêtres se succèderont, mais rien ne changera : Ellviller veut son indépendance tout comme Cappel l’avait voulu, il y a un siècle.
Farschviller le 28 mai 1812
Monseigneur,
Je viens de recevoir votre lettre en date du 23 mai par laquelle vous me marquez que Pierre RISSE, maire d’Ellviller, fait des plaintes contre moi, tandis que les échevins et tout le conseil de la fabrique ont plus de sujets d’en faire contre lui comme ils en ont déjà fait plusieurs fois contre lui, tant à Monseigneur qu’à Monsieur le préfet. Il se plaint contre moi en son propre nom, je n’en suis pas fort étonné, mais que toute la commune doit se plaindre de moi, cela me surprend, n’ayant donné aucun sujet à la commune de se plaindre, et je ne crois pas qu’aucun habitant ait signé la plainte non plus. Pour ce qui regarde sa propre personne, je ne l’ai jamais insulté à l’église, et encore moins à cause des habitants de Loupershouse, surtout que ce n’est pas à lui à pouvoir me faire donner les gains de supplément que les habitants de Loupershouse me doivent donner. Par ailleurs, je ne dis pas que je suis absolument exempt, et voilà comment :
Le receveur de la fabrique voulant rendre les comptes, j’ai convoqué au cours de la messe paroissiale les échevins et le conseil de fabrique pour après les vêpres, et, en même temps, j’ai invité les maires de Loupershouse et d’Ellviller de s’y trouver également. Néanmoins celui d’Ellviller ne s’y trouvait pas. Le dimanche après je l’ai invité encore une fois et il est venu. On a donc commencé à discuter et allouer article par article, à la fin M. le maire d’Ellviller demande où était donc l’argent de la quête qu’on fait tous les dimanches ? On lui a répondu qu’on quêtait pour les messes pour les défunts de la paroisse et qu’il entendait bien les publier tous les dimanches. Il dit sur cela que cet argent devait être employé à la fabrique et que ceux qui voulaient faire dire des messes pouvaient le faire à leur dépend. A cela, je lui ai répondu qu’on avait toujours quêté pour les défunts et que c’était là l’intention de ceux qui donnent. Pour le satisfaire, le dimanche après, j’ai dit en chaire : jusqu’ici on a toujours fait la quête pour les défunts, mais il y en a qui disent que cet argent doit être pour la fabrique et non pas pour les défunts. Et pour les contenter dans la suite, on ferait la quête pour la fabrique et pour les défunts. C’est ce qu’on a fait pendant trois dimanches de suite, et comme on a rien eu, on ne l’a pas continué. Voilà sans doute l’insulte qu’il prétend que je lui ai faite à l’église.
Dans la même séance, il a dit qu’il n’acceptait pas les comptes de 102 francs pour la cire, de 24 francs pour le vin et 3 francs pour les hosties. On ne dépense pas autant pour 52 dimanches et quatre fêtes. On lui a montré les quittances et sur cela il répondit qu’elles étaient fausses et que tout le monde pouvait en faire des pareilles.
Je lui ai reproché : vous nous prenez donc pour des voleurs ? et que voulez vous dire par 52 dimanches ? C’est donc moi qui dois fournir les objets les jours ouvrés ? Il me dit oui ! Et sur cela tout le monde se levait contre lui et les échevins lui ont tellement dit que j’étais obligé de les apaiser et pour cela j’ai dit : vous voyez bien qu’il déraisonne et d’ailleurs laissez-le tranquille, la loi lui donne aucun suffrage ici. Voilà sans doute les insultes d’idiot, d’inapte et de zéro qu’il prétend que je lui ai faites. Mais comme je suis le seul contre qui il peut se venger et porter des plaintes, il paraît qu’il n’a pas manqué, car contre les autres il ne peut rien faire.
Pour ce qui regarde savoir défendre de sonner la cloche, afin que les habitants de Loupershouse……………… cela est très mal…………….de la part de M. le maire, tandis que tout le village peut attester qu’on a toujours sonné trois coups même pour les messes basses toutes les fois que j’en disais à Ellviller. M. Risse a donc tort………..que les habitants d’Ellviller font des plaintes contre moi tandis qu’il n’y en a peut-être pas une seule.
M. Risse, dimanche enfin qu’il m’a fait informé sur la plainte contre moi , je consens très volontiers, si vous le jugez à propos pour vous convaincre de la méchanceté de ce maire, et voir également comme vous deviez avoir une …………….par la pétition en date du 26 avril que le conseil de la fabrique vous a adressée que c’est contre lui qu’on devait faire des plaintes parce qu’il met tout en désordre pour ce qui regarde le service divin. Vu que les habitants d’Ellviller sont de bonne volonté de contribuer leur part de ce qui est parlé dans le budget de la fabrique, mais lui seul les détourne et les entête.
D’ailleurs, monsieur, je ne cherche pas de me justifier moi-même, toute la paroisse doit me justifier. Demandez à M. COLT, mon prédécesseur, actuellement curé de Faulquemont, il vous dira comme il était traité par ce M. RISSE dans le temps où il était simple particulier, à plus forte raison maintenant étant un glorieux maire.
Voilà, monsieur, tout ce que je vous écris sur ce fait et si j’étais devant vous je saurais vous en dire davantage.
En attendant, monsieur, je suis avec la plus grande humilité votre très humble serviteur ERRARD, desservant à Farschviller.
Il faudra attendre 1826, pour que, lors de la réunion extraordinaire du conseil de fabrique du 1er janvier, l’abbé Georges SIEBERING fasse un pas de géant vers le maire en disant qu’il lui est difficile, voire même impossible, de se rendre à Loupershouse et à Ellviller durant les mois d’hiver, pour l’administration des sacrements aux malades, le mauvais état de la route et les inondations provoquées par le Mutterbach rendant le chemin totalement impraticable, tant à pied qu’à cheval.
Il demanda, par conséquent, à l’évêché que ces deux villages puissent être rattachés à la paroisse de Hoste.
Mais ce n’est que 21 ans plus tard, en 1847, que l’accord fut donné : Loupershouse et Ellviller furent enfin détachés de la paroisse de Farschviller.